L’année 2022 se termine avec un coût important pour les portefeuilles d’actions. Quatre leçons à ne pas oublier

Economie & Finance

L’année 2022 s’achève avec marchés confus et étourdi, mais encore assez solide. La confusion est due au fait que l’on ne sait pas trop comment traiter les données macroéconomiques : à la hausse ou à la baisse quand elles sont bonnes ? à la hausse ou à la baisse quand elles sont mauvaises ? Et elle est augmentée par le fait que l’économie envoie des signaux contradictoiresi, non seulement aux États-Unis mais aussi en Europe et en Asie, a souligné Alessandro Fugnoli, stratège financier chez Kairos, dans sa chronique “The Red and the Black”. L’évolution lente, mais progressive, rend les choses encore plus compliquées, baisse de la liquidité due au resserrement quantitatifce qui augmente l’importance relative des aspects techniques des produits dérivés par rapport aux fondamentaux.

Inflation à des niveaux non pathologiques

La solidité relative du marché, en revanche, reflète celle de l’économie réelle, qui continue de croître “alors que l’inflation est déjà revenue à des niveaux que l’on pourrait encore qualifier d’excessifs mais non plus de pathologiques”, a noté M. Fignoli. Cette solidité ne peut toutefois pas se traduire par une hausse du marché en raison de l’interdiction expresse de la Fed et de la possibilité d’une récession mondiale en 2023, une récession que les banques centrales montrent qu’elles sont prêtes à accepter, voire à provoquer, comme seul moyen de rééquilibrer l’offre et la demande.

Coût important pour les portefeuilles

L’année 2022 se termine toujours avec un coût pertinent pour les portefeuilles. A la perte de près de 14% de l’indice Msci World des bourses mondiales (mesurées en euros) et aux pertes sur les obligations, il faut ajouter, souligne le stratège, les la dépréciation de l’euro (de 7% par rapport au dollar) et la perte de pouvoir d’achat due à l’inflation de 10%.

“Après avoir payé un prix aussi élevé, les investisseurs ne devraient pas essayer d’oublier cette année 2022. Au contraire, ils devraient en étudier les leçons et essayer de les garder bien en tête”, a conseillé M. Fugnoli, en énumérant quatre leçons.

Quatre leçons à ne pas oublier

La première leçon est que Prévisions à 12 mois doit être pris avec un très gros grain de sel. Ces jours-ci, le marché est aux prises avec les prochaines estimations à trois ans publiées par la Fed le 14 décembre. Ceux-ci indiquent des Fed Funds à la fin de 2023 à un niveau de 5-5,25%. Le marché n’est pas d’accord et évalue les taux à court terme de fin 2023 à un demi-point en dessous de ceux de la Fed. “Ex-ante, cela semble être un écart significatif, mais ce n’est rien comparé à la différence ex post entre ce que la Fed a estimé il y a exactement un an pour la fin de 2022 et ce qui s’est réellement passé”, a souligné le stratège. Les points d’il y a un an prédisaient les taux d’aujourd’hui à 0,75-1, alors qu’en réalité ils sont à 4,25-4,50. Si l’on se réfère ensuite aux estimations de fin 2021, le consensus estimait que les taux resteraient à zéro jusqu’à la mi-2023.

Qu’est-ce que cela signifie en pratique ? Cela signifie que les gestionnaires doivent toujours avoir un scénario de base à l’esprit (sinon on ne voit pas comment justifier les choix de portefeuille), mais qu’ils doivent inclure dans leur réflexion

des évaluations des risques des scénarios alternatifs, même éloignés du scénario de base. “Moments de faible volatilité devrait donc être exploité pour acheter une protection, tandis qu’un tampon de liquidité devrait être créé pour pouvoir tirer parti des opportunités dans les moments de forte volatilité”, a suggéré M. Fugnoli.

Une démondialisation déstabilisante et dangereuse

La deuxième leçon de 2022 est l’importance de la géopolitique. En réalité, la géopolitique a également été déterminante dans les trente années de mondialisation, mais elle l’a été de manière positive, du moins pour les marchés, et elle a été discrète, constante et silencieuse. La démondialisation, en revanche, se présente désormais comme agitatrice, déstabilisatrice et dangereuse. Si la mondialisation a vu le triomphe des actifs financiers, la

La démondialisation voit la réapparition stratégique des actifs réels et des valeurs refuges. Certes, 2023 sera tactiquement favorable pour certains actifs papier (notamment obligations d’État de qualité) mais, à plus long terme, le volant de liquidités devra être contrebalancé par un portefeuille beaucoup plus robuste d’actifs réels, comprenant bien sûr une composante en actions, éventuellement orientée vers la valeur et avec de faibles multiples.

La comparaison avec les années 1970 est logique

La troisième grande leçon, poursuit Fugnoli, est que la comparaison avec les années 1970, souvent tournée en dérision ces deux dernières années, est parfaitement logique, au point d’être une référence constante pour une Fed qui vise avant tout à ne pas répéter les erreurs de cette période. Les éléments de base sont tous là, peut-être même amplifiés. Guerre froide, marché du travail rigide, chocs d’approvisionnement intermittents, crise énergétique, politiques budgétaires expansionnistes, inflation endémique et tentatives futiles de contrôle administratif des prix : rien ne manque. La fermeté que la Fed se propose d’exercer non seulement en 2023, mais aussi au cours des deux années suivantes de taux réels positifs, ne peut s’expliquer que par les éléments suivants la crainte de retomber dans le piège de la politique monétaire d’il y a un demi-sièclelorsque les taux ont été abaissés dès que nous sommes entrés en récession, alors même que le feu de l’inflation n’avait pas encore été totalement maîtrisé.

Attention aux faux départs

La quatrième leçon concerne le gestion de la volatilité. Pendant les marchés baissiers, on est toujours tenté d’anticiper la fin du cycle négatif et de parier sur la reprise. Les reprises des marchés baissiers sont le résultat de cette attitude, ainsi qu’un effet naturel du positionnement. “En 2022, nous avons eu plusieurs exemples de ces faux départs et il est probable qu’il y en aura d’autres l’année prochaine”, a prédit M. Fugnoli selon qui la leçon à retenir est que les reprises des marchés baissiers, qui offrent souvent des opportunités intéressantes, doivent être chassées en achetant de la volatilité sans modifier la structure du portefeuille. A l’inverse, le moment venu, c’est-à-dire… lorsque la Fed indique clairement qu’elle a l’intention de changer de politique.Ce sera le portefeuille qui devra changer structurellement”. Ainsi, 2023 a la possibilité d’être finalement “une année modérément positive”. Il sera décisif, a conclu M. Fugnoli, de ne pas la compromettre en se laissant influencer par sa volatilité. ()