Actions, voici pourquoi, selon Goldman Sachs, il n’est pas encore temps de miser sur les valeurs de croissance plutôt que sur les valeurs de rendement.

Economie & Finance

Les actions européennes des secteurs de la banque, de l’énergie, de l’automobile et des matières premières sont sous-évaluées par rapport à leurs valorisations historiques et se négocient à des multiples cours/bénéfices (p/b) à un chiffre, soit une décote importante par rapport à leurs homologues américains. Les analystes de Goldman Sachs soulignent qu’en début d’année, les valeurs de valeur/croissance étaient au centre de l’attention des investisseurs après la hausse des rendements réels, qui a mis sous pression le secteur technologique d’abord, puis les autres valeurs de croissance. Pendant une courte période, la décote des actions “value” s’est réduite, mais pas parce que leurs valorisations avaient augmenté, mais parce que celles des actions à forte croissance se sont effondrées. “Maintenant, la décote a encore augmenté”, préviennent les analystes de Goldman Sachs.

Il convient toutefois de garder à l’esprit que les définitions de la croissance et de la valeur sont trop larges : en fait, si l’on examine les deux catégories à la loupe, on constate que les valorisations dans des domaines tels que l’économie numérique ou la croissance pure ont diminué par rapport à celles de 2020 et 2021, tant en termes absolus que relatifs, tandis que certaines valeurs défensives ont bénéficié de primes élevées. Il s’agit d’entreprises qui se sont distinguées par des bilans solides, un Roe (ratio de rentabilité des capitaux propres) élevé, des ventes importantes et des bénéfices croissants. Mais d’une manière générale, les investisseurs notent que les valeurs de rendement se négocient actuellement à des prix très inférieurs à leurs moyennes à long terme, tandis que les valeurs de croissance se négocient à un prix élevé.

Le paradoxe des valeurs de rendement

Tout d’abord, les risques d’une récession imminente et d’une forte incertitude politique ont conduit ces derniers mois les opérateurs à préférer les valeurs défensives plus sûres, ce qui a annulé l’avantage que les hausses de taux auraient pu avoir pour les secteurs de valeur. “Lorsque les taux augmentent, les zones de valeur du marché ont tendance à surperformer les secteurs de croissance tels que l’économie numérique, c’est pourquoi nous continuons à penser que les actions à plus forte croissance souffriront de la hausse des rendements.” Deuxièmement, les experts de Goldman Sachs soulignent que “les actions “value” ont gagné plus que les actions “growth””, mais “le paradoxe est que plus les actions “value” gagnent, plus les investisseurs les jugent non viables, avec pour conséquence une augmentation de leur décote”. En général, la surperformance des actions “value” est corrélée à une décote supérieure à la moyenne, à une croissance économique robuste, à une incertitude politique contenue et à des taux plus élevés.

Les actions “value” en hausse aux États-Unis et en baisse en Europe

S’il est vrai que les valeurs de rendement européennes ralentissent leur tendance à la hausse malgré la forte augmentation des rendements réels, il est également vrai que les valeurs de rendement américaines se sont légèrement appréciées par rapport à la croissance. Les raisons en sont l’atonie de la croissance en Europe, son paysage politique très incertain, et l’augmentation des flux d’esg, qui appartiennent structurellement aux secteurs de valeur sous-évalués.

Les perspectives des secteurs bancaire, technologique et énergétique

“A moyen terme, nous nous attendons à une hausse des rendements réels et nominaux, ce qui se traduirait par un soutien au secteur bancaire”, expliquent les analystes, qui surpondèrent les banques dans le portefeuille, lesquelles, en tant que valeur, ne seront pas pénalisées par une hausse des taux. Bien qu’ils soient conscients des risques d’une éventuelle récession en Europe à court terme, les économistes de Goldman Sachs estiment qu’elle sera mineure et ne devrait pas mettre en péril la résilience du marché du travail en Europe. Nous accordons une attention particulière aux banques nationales britanniques”, soulignent-ils. En revanche, le secteur des technologies semble particulièrement vulnérable aux hausses de taux, notamment aux États-Unis.

D’autres préoccupations affectent toutefois le marché européen de l’énergie : le passage à des sources d’énergie à faible teneur en carbone désavantagera les compagnies pétrolières, qui verront leurs perspectives de croissance des bénéfices réduites. En outre, un ralentissement des économies entraînerait une baisse de la demande de pétrole. Les fonds ESG sont assez nombreux en Europe, mais il n’en va pas de même aux États-Unis. Ces fonds sont nettement sous-pondérés compte tenu des mauvais scores environnementaux que les entreprises de l’UE parviennent à obtenir. Bien sûr, cela pourrait changer si l’on considère que la taxonomie de l’UE veut considérer les politiques vertes comme une norme pour les entreprises qui détermine leur crédibilité et leur capacité à attirer les investissements.

L’indice de volatilité est en hausse, une récession imminente est attendue en Europe, l’inflation est élevée, ce qui crée une incertitude quant aux éventuelles mesures de politique monétaire et aux mouvements de taux, et les risques géopolitiques sont accrus. Ce mélange d’ingrédients conduit à des valorisations plus faibles pour le marché mondial et à une prime élevée pour les actifs plus défensifs.

Le conseil de Goldman Sachs

“Nous surpondérons les valeurs bancaires, de l’énergie et des matières premières, restons neutres sur les valeurs automobiles, tout en sous-pondérant les valeurs chimiques, de consommation et de construction”, suggèrent les analystes de Goldman Sachs. “Le scénario politique européen reste instable, mais les annonces récentes sur la politique énergétique laissent présager un changement majeur”, préviennent les experts de la banque d’investissement qui estiment que l’inflation atteindra un pic vers la fin de l’automne et que le plafonnement des prix des matières premières devrait conforter ce scénario. Dans l’ensemble, nous pensons que le marché est trop pessimiste quant aux perspectives de croissance de certains secteurs de valeur, notamment les banques, les services publics et les sociétés de ressources essentielles”, souligne-t-on chez Goldman Sachs. Les banques profiteront de la hausse des taux, les services publics de la rareté des approvisionnements en énergie et de l’importance accrue accordée à la transition énergétique, et les entreprises liées aux matières premières de la forte demande de métaux. En outre, la hausse des taux décourage l’achat d’actions de croissance au profit d’actions de valeur. ()